Bilan du congrès annuel 2023 de l’Association des économistes québécois

Québec, le 12 mai 2023 – Face aux défis sans précédent que posent les changements climatiques, la finance durable se présente comme un levier essentiel pour concilier la croissance économique et la lutte contre le dérèglement climatique. Dans le cadre du congrès annuel de l’Association des économistes québécois, ce sont près de 200 économistes et acteurs de la communauté des affaires qui se sont réunis à Québec pour échanger sur les outils et défis liés à la transition vers une économie durable, inclusive et équitable pour tous.


« Le thème du développement durable s’est imposé cette année, car il s’agit d’un sujet incontournable pour notre avenir commun », souligne Sébastien McMahon, président du Congrès 2023 et stratège en chef chez IA Groupe financier. « En effet, les changements climatiques, la perte de biodiversité, l’épuisement des ressources naturelles et les inégalités croissantes exigent une collaboration étroite entre tous les acteurs de la société. En plus d’aborder les obstacles et les défis qui entravent la transition vers un modèle économique plus durable, nous avons également discuté du rôle crucial que doivent jouer les investisseurs dans la mobilisation des ressources financières nécessaires pour soutenir les entreprises et les projets qui contribuent au développement
durable. Et notre association n’est pas en reste en soutenant proactivement le rôle du mentorat comme moteur de durabilité de notre Québec inc. »


Lors du premier atelier, trois intervenants ont abordé les liens entre les politiques climatiques et la performance économique. Benoît Durocher, vice-président directeur et chef stratège économique chez Addenda Capital, a parlé de la pertinence des politiques comme la taxe sur le carbone et le marché du carbone pour internaliser les externalités telles que les émissions de CO 2 . Alain De Serres, directeur de la surveillance des politiques structurelles à l’OCDE, a souligné l’importance des politiques climatiques pour stimuler les investissements dans les économies émergentes et en développement, lesquelles présentent des opportunités de réduction à la marge intéressantes, alors que Dominique Lapointe, stratège en macroéconomie mondiale chez Manuvie, a abordé les principaux canaux à prendre en compte pour modéliser l’effet des changements climatiques sur les risques et les rendements à long terme. Les impacts climatiques sur la productivité se feront sentir différemment entre chaque région, le Canada s’en tirant mieux sur ce plan que les pays émergents.

Le dîner-conférence en compagnie de Bertrand Millot, chef, Investissement durable à la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), a mis en lumière l’approche de la CDPQ en investissement durable. Engagée à intégrer les considérations ESG dans son processus d’investissement depuis plus de 15 ans, la CDPQ représente un véritable exemple de leadership climatique au Québec. En plus d’expliquer les facteurs clés à prendre en compte en matière d’investissement durable, M. Millot a expliqué la position de la CDPQ quant au retrait des investissements dans le secteur pétrolier et a souligné l’importance d’adopter un cadre clair dans l’analyse des pratiques des entreprises.

Une table ronde a ensuite permis de discuter des leviers indispensables en matière de finance durable. Geneviève Morin, présidente-directrice générale de Fondaction, a soulevé que la finance qui vise à générer un impact social positif va maintenant de pair avec les rendements à long terme puisque la transition vers des produits et services verts est inévitable. Dans le même ordre d’idée, François Boutin Dufresne, associé directeur à Sustainable Market Strategies & Nordis Capital, a rappelé l’impact des signaux de prix que peuvent transmettre les investisseurs, réitérant l’importance d’influencer les gestionnaires de portefeuille à faire des choix de placement plus durables. Charles-Antoine St-Jean, président du Conseil canadien des normes d’information sur la durabilité, a quant à lui abordé le rôle des normes afin de mettre de l’ordre dans les données partagées par les entreprises en matière d’ESG. Dans les prochaines années, on pourra d’ailleurs observer une convergence des différentes approches pour mesurer les impacts climatiques.


Quels sont les effets de la concurrence sur la finance durable ? C’est la question à laquelle ont répondu Anthony Durocher, sous-commissaire du Bureau de la concurrence du Canada, Simon Gaudreault, économiste en chef et vice-président de la recherche de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, et Marina Frangioni, professeure à l’École des sciences de l’administration de l’Université TÉLUQ. Les trois panélistes ont mis de l’avant les effets positifs de la concurrence sur l’innovation et l’utilisation des ressources, mais ont aussi abordé les nuances et défis qu’elle soulève. Ils ont appelé à encourager un marketing honnête et
à favoriser les politiques proconcurrence pour assurer une transition soutenable.


À l’occasion du cocktail en collaboration avec la Société canadienne de science économique, Jean St-Gelais président du conseil d’administration de Beneva et de la CDPQ, ainsi qu’Olga Farman, associée directrice de Norton Rose Fulbright, ont mis en lumière le rôle du mentorat pour promouvoir le développement durable. Lors du déjeuner-conférence du jour 2, Jean Boivin, stratège en chef du BlackRock Investment Institute, a souligné que la transition climatique créera des gagnants, mais aussi des perdants. Ceux qui réussiront à identifier les opportunités pourront en tirer les meilleurs rendements. Depuis 2020, l’environnement économique a basculé en raison de trois grands facteurs qui risquent dorénavant de compliquer l’arbitrage entre inflation et croissance, soit : l’environnement géopolitique, l’aspect démographique et, évidemment, la transition climatique.
Dans une présentation abordant les défis économiques et l’impact des politiques publiques, Robert Gagné, professeur titulaire à HEC Montréal et Fellow au CIRANO, a discuté de la fiscalité québécoise, du cadre institutionnel en place et des pratiques concurrentielles. Il a notamment cité en exemple les crédits d’impôts des entreprises dont la valeur relative est 200 % plus élevée qu’en Ontario et affirmé qu’en matière de concurrence, les politiques au Québec ne sont pas assez agressives. De son côté, Marcel Boyer, professeur émérite de l’Université de Montréal, également chercheur et Fellow au CIRANO, a présenté le contenu de son livre « Social democracy, capitalism and competition ». Il a souligné que les gouvernements devraient se concentrer à s’assurer que les signaux envoyés aux entreprises et à la population sont les bons.


À quoi ressembleront les marchés de demain ? Les trois panélistes, Éric Noël, prospectiviste et conseiller international d’Oxford Analytica, Alain Chandonnet, président-directeur général de l’Institut national d’optique et Marie-Pierre Ippersiel, présidente-directrice générale de PRIMA Québec, ont partagé leur point de vue sur la question. L’intelligence artificielle et le quantique auront un rôle important à jouer dans l’innovation, ce qui permettra aux économistes d’accéder à une quantité de données et à une capacité de traitement jamais vues auparavant. Afin d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050, le gouvernement devra se doter d’une véritable politique industrielle. D’où l’importance d’identifier les secteurs et joueurs potentiels qui pourront se doter d’objectifs clairs à atteindre.


Lors du dîner-conférence, Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, a souligné que l’impact négatif des changements climatiques se fait déjà sentir sur l’économie canadienne. Si tous les pays respectent leurs engagements à cet égard, on peut d’ailleurs s’attendre à ce que l’augmentation des températures et des précipitations engendre un vent de face de 5,8 % au PIB canadien d’ici 2100. Les gouvernements devraient dès maintenant être prudents dans leurs prévisions de long terme. L’estimation des impacts sur le PIB est un outil essentiel à développer et à utiliser dans l’élaboration des politiques gouvernementales. Et si la modération était porteuse d’une meilleure croissance et d’un meilleur bien-être à long terme ? C’est l’idée amenée par Pierre-Olivier Pineau, professeur titulaire et titulaire de la Chaire en gestion du secteur de

l’énergie à HEC Montréal. Faisant allusion à la surconsommation d’énergie par habitant, il soutient que le Canada fait piètre figure en comparaison aux pays européens dont le PIB par habitant est pourtant comparable. Anne-Marie Hubert, associée directrice – Est du Canada chez EY Canada, a quant à elle appelé les gouvernements à intégrer la finance et le climat dans les décisions financières. Elle soutient que les entreprises savent bien ce qu’elles doivent faire, mais qu’elles en seront incapables si les mêmes contraintes ne s’appliquent pas à tous. Le gouvernement doit intervenir et mettre en place une réglementation claire et uniforme. M. Pineau a conclu avec une bonne nouvelle : le Canada a énormément d’options pour réduire sa consommation tout en améliorant sa richesse.

À propos de l’Association des économistes québécois
L’Association des économistes québécois, principal regroupement d’économistes francophones en Amérique est une association dynamique et active dans divers secteurs d’activités: entreprise privée, secteur public, milieux syndicaux, associations, monde universitaire. Elle a pour mission le développement et la diffusion du savoir économique, l’éclairage des débats publics et la valorisation du rôle de l’économiste. En accord avec son slogan « Pour des choix éclairés », l’Association est reconnue comme un interlocuteur crédible et impartial dans les débats économiques. Pour en connaître davantage sur l’Association et ses activités, visitez le site web à economistesquebecois.com et les réseaux sociaux Facebook, LinkedIn, et Twitter.