Consultations prébudgétaires 2022-2023 : Des réformes majeures qui nécessitent un plan sur plusieurs années

Communiqué de presse
Pour diffusion immédiate

Montréal, 2 mars 2022 – Le Comité des politiques publiques (CPP) de l’Association des économistes québécois a présenté ses propositions au ministre Eric Girard en vue de son prochain Budget. Le CPP croit que des réformes majeures sont nécessaires pour moderniser l’appareil public québécois afin de livrer les services promis à la population et pour atteindre les objectifs économiques, climatiques et financiers que le Québec s’est fixé. Il est essentiel que le gouvernement se donne dès maintenant un plan avec des mesures échelonnées sur plusieurs années.

Garder le cap sur le retour à l’équilibre budgétaire et la réduction de la dette

Dans le contexte actuel des risques reliés aux enjeux géopolitiques et à l’évolution de la pandémie, une économie forte et des finances publiques saines demeurent plus que jamais essentielles à la capacité de l’État québécois de livrer de façon durable les services promis à la population. Les progrès réalisés pour réduire le niveau d’endettement du Québec au cours des années précédant la pandémie ont été appréciables. Malgré cela, la dette du Québec demeurait au 31 mars 2021 plus élevée que la moyenne des autres provinces canadiennes et la pandémie l’a poussée à la hausse.

Le CPP croit que la Loi sur l’équilibre budgétaire et la Loi sur la réduction de la dette et instituant le Fonds des générations ont eu des impacts positifs sur les finances publiques, et qu’elles doivent être non seulement conservées mais aussi modernisées. À cet égard, le CPP appuie pleinement les propositions de modernisation développées pour le ministre en collaboration avec la CFFP de l’université de Sherbrooke, le CIRANO et l’IDQ et rendues publiques l’automne dernier.

Pénuries de main d’œuvre : passer de la création d’emplois à la création de richesse

La forte reprise depuis le creux du printemps 2020 a ramené à l’avant plan les pénuries de main-d’œuvre qui existaient en 2019 avant la pandémie et qui vont perdurer.  Le gouvernement a annoncé en novembre dernier de nouvelles mesures pour former ou requalifier et attirer des travailleurs vers des secteurs où les besoins sont plus criants. Dans cette optique, le gouvernement devrait aussi réévaluer et ajuster au contexte actuel les mesures visant les groupes moins présents sur le marché du travail dans l’optique d’augmenter au maximum leur taux de participation.

Dans une économie avec des pénuries de main-d’œuvre importantes, des emplois « créés » par un projet le sont largement aux dépens d’autres projets qui pourraient créer d’autres emplois.  Le CPP de l’ASDEQ recommande donc au gouvernement de procéder à une révision systématique des interventions gouvernementales en développement économique afin de remplacer les critères reliés à la création d’emplois par des critères reliés à la création de richesse, notamment la transformation à la hausse des emplois existants et la hausse de la productivité.

Moderniser la livraison des services et lier les hausses de rémunération dans le secteur public à la productivité

Plusieurs déficiences dans le système de santé du Québec avaient déjà été identifiées avant le choc de la pandémie. Ce qui est moins connu, c’est que les dépenses en santé au Québec étaient déjà parmi les plus élevées du monde occidental en 2019, résultat d’une forte croissance depuis 2004. Cette croissance n’a pas découlé principalement du vieillissement de la population, mais de plutôt de l’inflation des coûts, en tête de liste les hausses de rémunération accordées aux médecins. D’importantes nouvelles dépenses ont été engagées depuis pour combattre la pandémie, incluant l’embauche de milliers de nouveaux employés et des rattrapages salariaux importants pour plusieurs groupes.

Au-delà des enjeux financiers, les problèmes de livraison dans les services publics ne pourront pas être résolus par l’augmentation continuelle des effectifs dans un contexte de pénuries de main-d’œuvre persistantes.  Les solutions de long terme devront passer par l’accélération de la modernisation de la technologie et de l’organisation du travail dans le secteur public québécois.  La modernisation technologique ne pourra se faire sans révision de l’organisation du travail qui est fortement encadrée par des dispositions de conventions collectives issues d’une autre époque. Une organisation du travail dépassée et la technologie déficiente font par exemple que les infirmières passent une trop grande partie de leur temps de travail à des tâches administratives. 

Le CPP de l’ASDEQ recommande donc que le gouvernement se donne rapidement un plan échelonné sur plusieurs années pour accélérer la modernisation de l’infrastructure technologique du réseau de la santé et de l’administration publique.  Le gouvernement devrait aussi se donner une politique de rémunération transparente et basée sur des principes clairs, incluant notamment un lien direct entre les augmentations de rémunération et la modernisation de l’organisation du travail pour améliorer la productivité et l’accès aux services. Dans un tel contexte, le gouvernement devrait aussi prioriser la livraison effective des services déjà promis à la population et la réparation des infrastructures existantes plutôt que l’ajout de nouveaux programmes ou la construction de nouvelles infrastructures.

Réformer la fiscalité pour atteindre nos objectifs économiques et climatiques.

Le Québec a choisi de se doter de plus de services publics que ses voisins et ces services nécessitent d’imposer un fardeau fiscal plus élevé. Le Québec fait toutefois reposer de façon plus importante qu’ailleurs son fardeau fiscal sur les activités de production, dont le travail, ce qui devient de plus en plus dommageable dans un contexte de pénurie de main d’œuvre. Une réforme de la fiscalité aiderait le Québec à atteindre les objectifs très ambitieux qu’il s’est donné en termes de rattrapage économique avec l’Ontario.  L’écofiscalité a aussi un rôle à jouer dans l’atteinte de nos cibles de réduction des gaz à effets de serre.

Le CPP de l’ASDEQ invite donc le ministre des Finances à développer et à rendre publics des scénarios de réforme de la fiscalité québécoise avec comme objectif l’amélioration de la performance économique du Québec, scénarios intégrant un ensemble de changements fiscalement neutre qui n’augmenterait pas le fardeau fiscal global, protégerait les ménages à faibles revenus et conserverait la progressivité du régime fiscal.  Des mesures écofiscales devraient faire partie des scénarios envisagés afin de préparer la population à changer ses comportements dès maintenant pour limiter leur empreinte environnementale, tout en tenant compte des réalités différentes vécues par les citoyens ne vivant pas dans les grands centres urbains.

Consultez les documents prébudgétaires du CPP ici.

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Association des économistes québécois
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