L’ENVIRONNEMENTALISME COMME RELIGION

Le Canal Savoir présentait récemment une longue entrevue avec une professeure de l’UQÀM sur « Cent ans d’école québécoise avant la Révolution tranquille » (disponible à http://www.youtube.com/watch?v=X6a6RVeC1vU&feature=youtu.be). Le thème principal de l’entretien était la prédominance de la religion à l’école ou ‘l’endoctrinement  religieux’, notamment illustré par l’omniprésence des signes religieux.

Tout en conservant un esprit critique sur certaines exagérations, du moins au sujet de la période que j’ai connue après le milieu des années quarante, je me suis posé la question suivante : un tel endoctrinement pourrait-il exister de nos jours, comme le produit d’une forme de religion laïque?

Cette interrogation n’était pas le fruit du hasard. Deux lectures m’avaient convaincu que l’environnementalisme ou sa version du développement durable s’apparentaient à une forme de religion laïque. Ce sont les textes de Joël Garreau, « Environmentalism as Religion » et plus récemment, le dernier chapitre du livre de Steven Landsburg, The Armchair Economist. Ce chapitre s’intitule “Why I Am Not an Environmentalism: The Science of Economics versus the Religion of Ecology”.

Vivons-nous présentement un endoctrinement en matière d’environnement et de développement durable? Je le pense et j’essaierai de l’illustrer par le vécu de l’institution où je travaille, l’Université.

L’approche probabiliste

Le travail académique demande une approche probabiliste dans la mesure et surtout, dans l’explication des phénomènes. Le manque de connaissances et la loi des conséquences inattendues sont toujours présents. Cette loi se traduit pour l’économiste par la différence entre les effets de courte et de longue période. De plus, dans les différentes disciplines, les résultats dits statistiquement significatifs s’estompent très souvent avec le temps ou avec les travaux subséquents.(Lehrer 2010).

La science économique insiste sur la nécessité des choix entre différents objectifs et entre plusieurs moyens et aussi de prendre conscience de l’hétérogénéité des préférences des individus. Elle devient ainsi un antidote à l’endoctrinement.

Les deux côtés d’une question

Il y a plusieurs années, le travail journalistique demandait de traiter les deux côtés d’une question en recherchant des interlocuteurs valables sur les aspects positifs et négatifs. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.

La vie universitaire a suivi le même cheminement. Aujourd’hui, il y a une quasi-absence de débats. C’est très manifeste dans le domaine de l’environnement: les solutions étant apparemment connues, il s’agit maintenant d’en faire la promotion avec des invités à «pensée unique».

C’est le cas de la Chaire publique de l’Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures. Créée en 1977 avec l’aide de la Fondation, elle organise annuellement un cycle de conférences ou de débats «à l’égard des problématiques majeures de notre temps».

Ces rencontres ont la nette tendance à être à sens unique comme le laissent entrevoir les invitations de cette Chaire sur son site : « La Chaire publique AELIÉS organise des événements éco-responsables et vous encourage à utiliser un moyen de locomotion vert. L’Université Laval est facilement accessible à pied, à vélo ainsi que par transport en commun».

Les priorités de l’administration

Comme le mentionnait le texte de mon blogue du 26 mars dernier, le phénomène majeur des études universitaires, ici comme ailleurs, est la détérioration relative des études de premier cycle qui concernent la masse des étudiants : la taille des classes s’est accrue, le recours à des pigistes aussi et le résultat est une réduction du temps d’étude et une inflation des notes. L’étudiant à plein temps est aujourd’hui à temps partiel à l’université.

Cette détérioration des études de premier cycle se situe au cœur de la mission universitaire. Elle est ignorée dans les communications de l’administration. Ce n’est pas le cas en ce qui concerne le sujet du développement durable. Cette question fait l’objet entre autres d’un rapport annuel, de multiples courriels de recommandations au personnel et aussi de mesures contraignantes comme une «taxe» unitaire de vingt-cinq sous sur les verres de carton utilisées pour les breuvages.

Selon un récent article de journal, l’Université serait en voie de devenir carboneutre :

 Si tout se passe comme prévu, l’Université Laval devrait devenir le premier campus carboneutre en Amérique du Nord d’ici ‘deux ou trois ans’. C’est du moins l’objectif qu’a énoncé mardi son recteur, Denis Brière, et ‘on prend les moyens pour le faire’ a-t-il assuré.  (Cliche 2013)

Conclusion

L’Université a  ici servi de simple illustration de la présence d’un endoctrinement à l’environnementalisme dans nos institutions. Il en résulte un éloignement des priorités de leurs missions principales.

Ainsi, les remises en question dans le domaine de l’environnement ne sont pas les bienvenues.

BIBLIOGRAPHIE

Cliche, J.-F.  2013 (16 janvier). « L’Université Laval en voie de devenir carboneutre », Le Soleil, p. 10.

Garreau, J. 2010 (Summer). « Environmentalism as Religion ». The New Atlantis. A Journal of Technology & Society, 28, p. 61–74. Aussi disponible à http://www.thenewatlantis.com/docLib/20100914_TNA28Garreau.pdf.

Landsburg, S.E. 2012. The Armchair Economist. Economics & Everyday Life, 2nd ed., p. 279-290. (Le chapitre de la première édition est disponible à http://ruby.fgcu.edu/courses/twimberley/EnviroPol/EnviroPhilo/WhyNotEnviro.pdf)

Lehrer, J.  2010 (13 déc.). « The Truth Wears off: Is There Something Wrong with the Scientific Method? », The New Yorker, 86:40, p. 52-58.  Aussi disponible à http://www.newyorker.com/reporting/2010/12/13/101213fa_fact_lehrer .